« Le secret maçonnique pour des fonctionnaires d’autorité peut générer doutes et suspicions quant à leur indépendance et à leur impartialité dans la recherche de la vérité, loin de la fraternité érigée par les loges en principe fondamental » ces propos sont tirés d’un article publié en mars 2007 sous le titre Police et franc-maçonnerie : La nécessaire transparence dans la revue du Schtroumpf, autrement dit le syndicat des commissaires et des hauts fonctionnaires de la police nationale. Son auteur, le commissaire Patrice Demoly était à l’époque patron de la brigade de répression de la délinquance économique. Ce superflic efficace et discret ayant eu à manipuler diverses bombes mediatico-politico-économiques des années 1990-2000 comme les affaires de la MNEF, l’Angolagate et le Crédit Lyonnais s’inquiétait des effets de l’appartenance maçonnique de certains policiers sur le déroulement des enquêtes (voir encadré). Preuve supplémentaire de l’influence de la franc-maçonnerie dans la police et plus particulièrement dans les hautes sphères du monde des commissaires, leur syndicat aurait, selon la presse, tergiversé durant deux ans avant de se décider à publier cette tribune.
Un état de suspicion
« Je ne crois pas que tous les francs-maçons soient des affairistes. Mais beaucoup d’affairistes le sont. Je respecte parfaitement les choix philosophiques des uns et des autres, mais ceux-ci ne doivent jamais être en contradiction avec la déontologie des fonctionnaires. Si l’on est amené à enquêter sur un membre de sa famille ou un proche, il faut en référer à la hiérarchie, de même que lorsqu’un dossier amène un franc-maçon à enquêter sur un des ses frères de loge, il devrait le dire. Il ne s’agit pas d’exiger, comme en Angleterre, que tous les policiers francs-maçons déclarent leur appartenance, et encore moins de déclencher je ne sais quelle chasse aux sorcières, mais on peut comprendre que le secret dont se réclament les francs-maçons puisse générer une opacité dans certains dossiers et entretenir des suspicions. On peut admettre que si l’on cache quelque chose, ce n’est peut être pas pour de bonnes raisons. J’ajouterai que quand j’étais petit inspecteur, on ne m’a jamais sollicité mais dès que je suis devenu commissaire, la GLNF a cherché à me recruter. Je n’ai pu m’empêcher de penser que l’on était davantage intéressé par mon pouvoir que par ma personne ». Ces confidences d’un commissaire de la région havraise aujourd’hui à la retraite, traduisent l’état de suspicion dans lequel sont tenus les policiers francs-maçons. Pour autant, peut-on reprocher à celui qui ne connaît pas grand-chose à la franc-maçonnerie de s’interroger sur les raisons de celui qui refuse de révéler son appartenance ? Il faut admettre que, la discrétion qui entoure l’appartenance réelle ou supposée de policiers à la franc-maçonnerie, alimente bien des fantasmes voire parfois une certaine forme de paranoïa. Mais il est également vrai que les paranoïaques aussi puissent être persécutés… Jacqueline Bernard, commissaire de police qui fut directrice départementale des renseignements généraux de Charente-Maritime de 2005 à 2008 est convaincue que sa mutation à Lille et la kyrielle de déboires administratifs qui l’accablent depuis qu’elle a refusé d’enquêter sur l’entourage de Ségolène Royal en 2007 sont le fruit d’une acharnement organisé par un réseau de francs-maçons de la GLNF (Grande Loge Nationale Française). Cette ancienne de la préfectorale qui a travaillé pour le renseignement et qui ne fait pas mystère de sa sensibilité « sociale » a publiquement accusé sur une radio locale le « réseau maçonnique du ministère de l’intérieur » de faire obstacle à la bienveillance à laquelle elle s’attendait de la part d’un gouvernement de gauche dans le traitement de son dossier administratif. Le problème, c’est que les dons de limier de cette spécialiste du renseignement semblent s’arrêter à la porte des temples. Car pressée de fournir les preuves de ce qu’elle avance, la commissaire reconnaît qu’elle ne se fonde que sur ce qui est « de notoriété publique ».
Assertions sans preuve
Faute de précisions et de preuves, ces accusations qui sont monnaie courante sont réduites à des assertions sans preuve, des insinuations sans autre fondement que la vieille antienne du complot maçonnique… En 2007 les éditions Michalon on publié sous le titre Police les aventures de Bénédicte Desforges, lieutenant de Police en région parisienne qui aborde à sa manière la question de la franc-maçonnerie dans sa corporation. Extraits : « J’avais entendu parler de cette chose comme d’une sorte de secte dont les membres se reconnaissaient par des signes invisibles des profanes (...) J’ai été approchée (comme ils disent) trois ou quatre fois. Cette approche se faisait sur le ton du secret : « Il faut que je te parle de quelque chose d’important, mais n’en dis mot à personne… » (…).
Ordinairement pistonnés et intouchables, rien de plus… La plupart étaient des délégués de syndicats, de mutuelles, de l’orphelinat, ou des trois à la fois, et le rayonnement policier de leurs vertus restait, par la force des choses, dans les basses fréquences. Et il y avait le patron…
« Aaah, le patron ! me disait-il. J’en fais ce que je veux, on est dans la même fraternelle ! (comme ils disent).
– Ah ? Ça se passe comme ça ?
– Évidemment, et c’est là tout l’intérêt, le court-circuit… »(…) Les soi-disant nombreux et influents francs maçons de la police nationale ne sont qu’une sorte de Rotary Club où la coutume dominante est l’échange de services, et le passe-temps la chasse aux sorcières profanes. Et les procès en sorcellerie. Sans jugement. Sans justice. Ni conseil de discipline. Juste dans le secret des commissions administratives paritaires. Et de leurs backrooms… Ça doit être un rite accepté (comme ils disent). La force de ce livre qui s’est vendu à 60 000 exemplaires est celle du témoignage. Mais, contactée pour plus de détails, Bénédicte Desforges s’est contentée de nous répéter ce qu’elle avait écrit, rajoutant même. « On sait bien que la plupart des commissaires sont francs-maçons ». Selon elle la franc-maçonnerie créerait une « hiérarchie parallèle » qui se substituerait à la hiérarchie administrative. Pour qui connait tant soit peu la franc-maçonnerie, l’affirmation fait sourire. Quant à savoir si ses affirmations sur le nombre et l’influence des policiers francs-maçons relève de l’enquête ou de l’ouï-dire, le seul fait de lui poser la question provoque l’indignation de l’auteure de Police, parce que si elle a écrit ça, nous dit-elle c’est parce que « ça se sait ». Imaginer qu’un policier pourrait vous mettre en cause sur de telles bases fait froid dans le dos…
Une fraternelle active
Le Groupement fraternel du ministère de l’Intérieur alimente tous les fantasmes. Baptisé le club La Reynie du nom du chef de la police de Louis XIV, cette association régie par la loi de 1901 a pour but « l’entraide de ses membres, l’établissement et le maintien de liens professionnels et sociaux entre eux et les groupements qu’ils constituent. Elle a pour mission de créer et de maintenir entre ses membres une solidarité et de travailler pour l’intérêt général ». Majoritairement ouverte aux policiers de tous grades, l’association accueille des francs-maçons de toutes obédiences. Son président, que nous avons rencontré revendique entre 250 et 300 membres, et autant de visiteurs. Il évalue le nombre de sympathisants à plus de mille. Ce qui, grosso-modo et si l’on s’en tient à cette estimation, représenterait 1,4% des fonctionnaires de police du ministère de l’Intérieur, soit une proportion de francs-maçons dans cette corporation trois fois plus élevée que dans l’ensemble de la population active. Le club La Reynie comprend dix-neuf sections dont six pour l’Outre-mer et une pour les membres extérieurs à une section régionale. Outre celle de l’Ile de France, les sections les plus actives sont celles de Toulouse et de Marseille. Celle de Bordeaux, jadis très active est à présent en sommeil. Il existait un temps une « fraternelle des trois monts » pour Montparnasse, Montsouris et Montrouge qui regroupait les frères policiers de la préfecture de police de Paris, mais celle-ci est également en sommeil. Les gendarmes, bien que cordialement accueillis aux réunions du club La Reynie, ont leur propre fraternelle, Les amis de Moncey qui, compterait dans ses rangs plusieurs généraux et relaierait les états d’âme des gendarmes auprès des ministères de la Défense et de l’Intérieur. Le club La Reynie compte plusieurs inspecteurs et contrôleurs généraux de la police nationale, des commissaires de police, des officiers de tous grades et environ 30 % de policiers de base. On y trouve quelques femmes et des membres de la pénitentiaire l’ont rejoint depuis peu. Concrètement, la vie du club La Reynie s’articule autour d’un déjeuner mensuel à Paris et plus épisodiquement en régions, qui réunit de trente à quarante membres et sympathisants. A chaque fois un orateur propose ses réflexions sur un sujet intéressant la profession au sens large. On y a abordé des sujets aussi variés que la grippe H1NI et le marché des médicaments, les effets sociaux de la crise économique, les conséquences de la question prioritaire de constitutionalité, les évacuations des campements roms, le port de la burqua… «Le rappel des valeurs de la République et de la franc-maçonnerie est systématique dans la présentation de nos travaux. L’honnêteté, le courage, la tolérance, la nécessité de toujours traiter celui que l’on poursuit en être humain sont les principes qui guident notre réflexion. Nous rencontrons régulièrement des représentants du ministère de l’intérieur pour leur présenter nos travaux. Toutes les sections ont participé à une réflexion visant à placer l’humain au centre des réformes actuelles. Ces propositions concrètes et peu couteuses ont été présentées fin 2012 au ministre de l’Intérieur » nous explique le président du club La Reynie, un ancien de la police de l’air et des frontières actuellement détaché à la sécurité routière et membre du Grand Orient De France (GODF). On ne doute pas que Manuel Valls qui ne cache pas avoir été membre de cette obédience accorde à ses ex-frères policiers une oreille attentive. Voilà pour la face lumineuse. L’autre face de la fraternelle des flics, sans être obscure, est entre ombre et lumière. Un inspecteur de la région bordelaise à présent à la retraite raconte : « La section de la fraternelle de Bordeaux se retrouvait au restaurant une ou deux fois par an. On était parfois une cinquantaine. Il y avait surtout des gradés. J’y ai vu un contrôleur et plusieurs commissaires, presque tous à la GLNF. Les gardiens de la paix étaient rares mais il y en avait et ils étaient tous au GODF. Chacun de nous avait les coordonnées des autres. Ce qui fait qu’en tant que syndicaliste mon carnet d’adresse m’a permis de résoudre humainement plusieurs dossiers litigieux grâce au dialogue de confiance que j’ai pu établir avec certains commissaires. Pour ce qui est de l’avancement ça pouvait jouer aussi mais c’était rare. Dans le cas où un poste était convoité par plusieurs candidats, s’il y avait un frère sur les rangs il pouvait être favorisé. Mais j’ai vu bien plus de carrières se faire grâce à la politique que grâce à la franc-maçonnerie. En tous cas, en ce qui me concerne, ça m’a plutôt desservi. On m’avait collé une étiquette de flic franc-maçon et anarchiste. Pour l’avancement ce n’est pas terrible… D’autant que la plupart des magistrats ont horreur de la franc-maçonnerie».
Si la présence de la franc-maçonnerie dans la police est réelle, son influence, heureusement, ne se limite pas à de petits arrangements entre amis. Un CRS raconte. « Au niveau de la police en tenue nous sommes en première ligne face à tous les malaises de la société. Et tout le monde n’est pas armé pour réagir correctement. Quand ont intervient sur certaines affaires où des étrangers et même des français d’origine étrangère sont impliqués, les réflexions xénophobes fusent. Certaines situations conflictuelles sont peu propices à la tolérance. C’est là que c’est le plus dur pour le flic franc-maçon. Une fois, dans un car, deux de mes collègues ont fait une charge verbale contre les étrangers. C’était deux gars du nord qui avaient des noms polonais à couper au couteau. Je les ai mouchés sur leurs origines et tout le car a rigolé. On s’en est souvenu. Ce n’est pas grand-chose mais je n’aurais peut-être pas réagi comme ça si je n’étais pas franc-maçon. ». Un sous-officier de gendarmerie dans la région de Marseille témoigne, lui, de la difficulté à « répandre la lumière »: « Le racisme ordinaire très présent dans la région finit par déteindre sur certains collègues. Je m’interroge sur ce que serait l’attitude de la gendarmerie aujourd’hui si l’extrême droite était au pouvoir. Déjà, le seul fait d’afficher son antiracisme dans notre corps est très mal vu. On passe tout de suite pour un gauchiste, un mauvais élément. Quand on est franc-maçon dans la gendarmerie, on a tout intérêt à rester discret. » Un ancien de la brigade des mineurs en région lyonnaise est plus nuancé mais guère plus optimiste : « Quand j’ai été initié j’ai été très surpris de découvrir que certains de mes collègues étaient maçons. Je les aurais davantage vus faire partie d’une officine barbouzarde. Pour d’autres c’était le contraire. J’ai été content de les retrouver là car je connaissais leur attitude respectueuse des personnes. Mais je ne crois pas que l’esprit républicain soit beaucoup plus développé chez les flics francs-maçons que chez les autres. On peut parfois un peu s’améliorer mais personne ne change vraiment de nature en devenant franc-maçon. Et puis fort heureusement, nous n’avons pas le monopole de la sensibilité aux droits humains».
Et puis il y a les syndicats de police. Dont on dit, ce qui n’est pas faux, que bon nombre de leurs cadres sont francs-maçons. Ce dont le citoyen devrait se réjouir. Car on n’imagine pas qu’un responsable syndical franc-maçon ne défende pas ses mandants conformément à une vision du monde respectueuse des valeurs de la république et des droits de la personne. Du moins ose-t-on l’espérer…
Infiltration et noyautage
Il n’y a pas que les préjugés contre les francs-maçons. Il y en a aussi contre la police. Un gendarme initié depuis une dizaine d’années raconte. « Quand je me suis présenté, c’était devant une loge réputée de gauche. L’enquête avec bien montré que je n’étais pas de droite, mais lors du passage sous le bandeau, j’ai été sévèrement questionné. Certains frères étaient carrément antiflics et c’est tout juste s’ils ne me soupçonnaient pas de venir les espionner.» Fantasme ? Paranoïa ? Pas nécessairement. Dans son livre Noir Chirac (Les Arènes 2002) consacré à la Françafrique, le journaliste François-Xavier Verschave écrivait à propos des relations entre franc-maçonnerie, police et « services » : « (…) l’initiation est un passeport bien utile, parfois indispensable pour accéder à des postes sensibles. » « Tous les services officiels étaient systématiquement noyautés, reconnaît Fred Zeller, ancien Grand Maître du GODF, qui a présidé la fraternelle des policiers. En consultant notre fichier, je m’aperçus que le nombre de policiers était considérable. Je ne pouvais toutefois pas m’y retrouver entre les honorables correspondants du SDECE (Service de Documentation Extérieure et de Contre-Espionnage et les gens du SAC (Service d’Action Civique). D’autres « infiltrations » sont du domaine public. Un officier du Renseignement militaire, Philippe Guglielmi, est devenu Grand Maître du Grand Orient de France. Un autre grand maître du GODF, Alain Bauer, adhérent au Parti Socialiste à 15 ans, est passé entre autres par le syndicat Force Ouvrière (créé par le stay behind) et la SAIC (Science Application International Corporation), à San Diego, une société qui travaille quasi exclusivement pour les Services américains. Il était, explique-t-il, chargé d’une mission ultra-secrète entre la France et les États-Unis, touchant à la Défense nationale. Puis il est devenu consultant en sécurité, cosignant des ouvrages sur la question avec Xavier Raufer, alias Christian de Bongrain, lui-même passé par les groupes d’extrême-droite Occident et Ordre nouveau. Les coauteurs font «l’éloge des méthodes radicales utilisées outre-Atlantique pour lutter contre la petite délinquance. »
Mais la plus célèbre des « infiltrations » est celle réussie par Michel Baroin. Ce jeune et brillant commissaire des Renseignements généraux a réussi à devenir Grand Maître du Grand Orient de France.
La franc-maçonnerie a-t-elle investi la police ou est-ce la police qui a investi la franc-maçonnerie ? On pencherait plutôt pour la deuxième hypothèse tant on sait que depuis Joseph Fouché, premier flic de Napoléon, les polices de tous les pouvoirs ont su obtenir petits et grands renseignements sous le sceau du secret maçonnique comme les curés le font depuis toujours sous celui de la confession.
Echange de services ? Sans doute. Mais pas forcément toujours au niveau qu’on l’imagine.
Notre ami gendarme affirme n’avoir jamais été sollicité par ses frères pour faire sauter une contredanse mais confie qu’il redouble d’indulgence quand il voit un macaron du GITE sur une voiture « Je ne vais pas verbaliser un frère si l’infraction est bénigne ». Dans une sous-préfecture du Nord-Ouest, le chef de la police municipale est membre de la Grande Loge de France. « Ici tout le monde se connaît. Si je disais que je n’ai jamais fait sauter un PV je mentirais. Mais je ne le fais pas que pour les frères et sœurs. Le plus souvent c’est à la demande du maire sur intervention de ses amis.» Devenir policier, est souvent la réalisation d’un rêve : servir la société, protéger, être utile. Mais il est rare que la routine administrative, la dureté du métier et l’ingratitude de certains citoyens ne ternissent les couleurs de ce rêve. Alors quand on propose à un policier d’entrer dans un club où l’on métamorphose le méchant père fouettard en gentil protecteur des valeurs républicaines, de la tolérance et de la laïcité, il ronronne de plaisir et retrouve courage dans l’exercice d’un métier difficile et ingrat. C’est peut-être d’abord à cela que sert la franc-maçonnerie dans la police : maintenir un idéal pour conserver honneur et dignité. Et rêver qu’il n’y a pas que des brutes, des escrocs…et des indics de basse police en ce bas monde.
Des dossiers sensibles : la MNEF et ELF Gabon
Les émois du commissaire Demoly avaient pour origine plusieurs affaires dans lesquelles des policiers ou de hauts fonctionnaires du ministère de l’Intérieur eurent connaissance de dossiers portant sur des frères de leur loge. Dans l’affaire de la MNEF (Mutuelle Nationale des Etudiants de France) qui défraya la chronique à partir de 1998, la mutuelle étudiante fut convaincue d’avoir pendant des années rémunéré de manière outrancière ses dirigeants et mis en place un système occulte de financement d’associations proches du parti socialiste. En marge de cette affaire il est apparu que l’avocat franc-maçon d’un dirigeant de la MNEF y avait fait embaucher le fils d’un haut fonctionnaire du ministère de l’intérieur appartenant à la même loge que lui. Ce haut fonctionnaire aurait ensuite profité d’une partie des émoluments ainsi perçus par son fils. Dans l’affaire ELF, traitée par le même service de délégation judiciaire, l’attention des policiers avait été attirée par la liste des membres d’une loge de la Grande Loge de France saisie lors d’une perquisition. Y figuraient en particulier les coordonnées de l’avocat déjà connu dans l’affaire de la MNEF, celles aussi d’Alfred Sirven, l’ancien homme à tout faire d’ELF Gabon alors en fuite aux Philippines. Celles, également, du haut fonctionnaire dont le fils avait été embauché à la MNEF. Or ce policier était à l’époque responsable de la coordination internationale des services de police et plus particulièrement des relations avec l’Asie. Comme l’avait à l’époque relaté l’hebdomadaire Paris Match, les policiers de la financière s’étaient demandé si Alfred Sirven ne disposait pas à Paris d’une source l’informant des investigations dont il faisait l’objet. Compte tenu de ces éléments, on peut comprendre que tout policier digne de ce nom ait pu s’émouvoir de telles proximités. Mais pourquoi imputer aux seules affinités philosophiques de ces personnes une supposée connivence ? Et pour quel résultat ? Aucun. Si le coup de gueule du commissaire Demoly a été très largement relayé par les media –preuve au moins que si la franc-maçonnerie noyaute la police, elle ne noyaute pas la presse, son souhait que des policiers francs-maçons déclarent leur appartenance lorsqu’ils ont à connaître de faits mettant en cause un membre de leur loge est demeuré lettre morte. Quant aux soupçons dont fut l’objet ce haut fonctionnaire du ministère de l’intérieur, ils n’ont abouti a aucune mise en cause. Compte tenu du professionnalisme tant des policiers que des magistrats –parmi lesquels l’inoxydable Eva Joly- en charge de ces enquêtes, on n’imagine pas que si quelque turpitude découlant de l’appartenance maçonnique de ces protagonistes avait pu être démontrée, celle-ci aurait pu ne pas être signalée aux dossiers de ces affaires.
« Le secret maçonnique pour des fonctionnaires d’autorité peut générer doutes et suspicions quant à leur indépendance et à leur impartialité dans la recherche de la vérité, loin de la fraternité érigée par les loges en principe fondamental » ces propos sont tirés d’un article publié en mars 2007 sous le titre Police et franc-maçonnerie : La nécessaire transparence dans la revue du Schtroumpf, autrement dit le syndicat des commissaires et des hauts fonctionnaires de la police nationale. Son auteur, le commissaire Patrice Demoly était à l’époq