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Interview de Philippe Meiffren Grand maître de la Grande Loge Traditionnelle et Symbolique Opéra

NGH Presse

Regroupant 4600 frères, répartis en France et dans les départements et régions d’outre-mer la Grande Loge Traditionnelle et Symbolique Opéra reste une obédience à taille humaine. Une caractéristique qu’aime souligner son actuel grand maître Philippe Meiffren, soucieux de maintenir un cadre traditionnel fort tout en cherchant à transmettre et promouvoir les valeurs de la franc-maçonnerie en dehors du temple.   

Propos recueillis par Hélène Cuny 

 

Hélène Cuny : Comment définiriez-vous la GLTSO par rapport aux autres obédiences ?
Philippe Meiffren : La GLTSO est née en 1958 d’une dissidence de la Grande Loge Nationale Française, pour des raisons de pratiques du Rite Écossais Rectifié (RER). Ce rite, qui forme tout le cadre de nos travaux est un peu notre ADN. Très imprégné de tradition judéo-chrétienne, il incarne l’esprit de notre obédience. On le retrouve dans les deux tiers de nos loges. Nos fondateurs ont toutefois souhaité que la GLTSO soit une fédération de rites : nous travaillons aussi au Rite Français, Rite Écossais Ancien et Accepté, Rite Standard d’Écosse et Rite d’York. 

HC : Comment la crise sanitaire a-t-elle été vécue au sein de votre obédience ? 
PM : le 13 mars 2020, de concert avec l’ensemble des obédiences françaises, décision a été prise d’interrompre les travaux. Cette annonce a bien sûr été douloureusement ressentie par nos membres. 
Nous avons tenté d’apporter à la fois une écoute et d’insuffler, malgré un climat de grande incertitude une dynamique positive. D’emblée nous avons souhaité être solidaires entre obédiences et mettre en place les mêmes mesures. Parmi celles-ci, point sensible, nous avons décidé qu’il n’y aurait pas de réduction de capitation. Le surplus devant servir à alimenter le tronc de bienfaisance qui permettra de venir en aide à tous les frères qui pourraient se retrouver en situation de détresse. 

HC : Quel enseignement la franc-maçonnerie peut-elle tirer de cette période ?
PM : Cette crise a permis de nous rapprocher. Notre appel à la solidarité a immédiatement été suivi d’un bel élan et s’est pleinement exprimé : « nous allons faire face », tel a été le leitmotiv. Face à cette épreuve, les frères, par leur pratique maçonnique quotidienne ont su dans l’ensemble garder une attitude sereine tout en continuant à avoir foi en l’avenir. Les nouvelles technologies ont été d’une utilité certaine pour éviter l’isolement. Néanmoins, elles ont leurs limites et le désir est grand pour nos membres de se retrouver et de reprendre le fil des travaux. 

HC : Quels sont vos projets pour l’obédience ?
PM : Nous avons mis ce temps de retrait à profit pour avancer sur certains points : en particulier sur celui de la communication tant interne qu’externe. J’insisterai surtout sur ce deuxième volet. Je pense que la GLTSO a toujours été très discrète, ne cherchant pas absolument à se faire connaître du monde extérieur. Privilégier une approche tournée vers le symbole et la tradition ne doit pas nous empêcher de rayonner et d’avoir une visibilité. Certes, notre gala annuel de charité, parrainé par un artiste de renom est devenu un rendez-vous incontournable. Mais cela ne suffit pas. S’ouvrir aux médias nous permettrait de mieux nous faire connaitre et de rendre plus aisé l’accueil de nouveaux frères. L’érosion de nos membres est un phénomène que nous ne pouvons ignorer. Je considère d’ailleurs qu’une structure qui ne s’interroge pas sur son avenir est amenée à péricliter. J’ai fait mettre en place un pôle jeunesse pour les 25 à 35 ans. Il s’agit de regrouper les plus jeunes frères de l’obédience et de partager avec eux leur vision de la franc-maçonnerie. Les langages ont évolué. Nous devons les intégrer pour faciliter nos rapports avec le monde extérieur. Nos apprentis et nos compagnons constituent aussi nos meilleurs atouts, car ils sont encore dans cette effervescence de la découverte. Ils ont beaucoup à nous apprendre.

HC : Vous évoquez les apprentis et les compagnons. Un certain nombre d’entre eux, toutes obédiences confondues, quitte la franc-maçonnerie avant d’arriver à la grande maîtrise. Qu’en pensez-vous ?
PM : Je m’inscris un peu en faux par rapport à cette affirmation. En effet nous rencontrons peu de défections de la part de nos apprentis et compagnons, sans doute pour différentes raisons : tout d’abord nos loges comptent en moyenne 18 frères, l’ambiance qui y règne est familiale. Ensuite, nous avons banni de notre processus de recrutement le passage sous le bandeau, ce qui renforce la confiance au parrain et aux enquêtes. Mais surtout, indépendamment des tenues habituelles, nous organisons des tenues d’instruction destinées aux apprentis et aux compagnons. Cet encadrement me parait essentiel, car il faut bien l’avouer lorsqu’on rentre en franc-maçonnerie on est un peu désorienté. Il est inconcevable de laisser nos plus jeunes membres sans réponse. Nos rituels doivent être expliqués. 

HC : Pour finir, que signifie à vos yeux l’engagement maçonnique ?
PM : Se réaliser ! L’engagement maçonnique, c’est la recherche de soi-même. C’est le fait d’avoir une pratique initiatique qui de degré en degré vous amène au plus profond de vous-même et à prendre conscience de vos forces et de vos faiblesses. Dans un monde de plus en plus contraint, nous avons cette liberté absolue de faire évoluer ce moi profond qui constitue l’essence de l’individu. Ce serait dommage de passer à côté.

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