Culture

La sélection littéraire du n°100

Essai
Les premiers hauts grades écossais
De Roger Dachez et John Belton
Éditions Dervy
510 pages – 26 € 

Depuis déjà plusieurs décennies, les historiens de la franc-maçonnerie ont considérablement progressé dans leur compréhension des origines de l’Ordre maçonnique. Il est ainsi possible de retracer l’histoire des trois premiers grades au XVIIIe siècle, mais on ne peut en dire autant pour les hauts grades apparus en Europe dès les années 1730. Roger Dachez et John Belton deux historiens chevronnés se sont attaqués à cette énigme et présentent dans cet ouvrage le fruit de leurs récents travaux. « Ce livre n’est pas, et ne peut vraiment pas être, un récit historique classique, séquentiel et continu. Il reproduit la progression de nos recherches et ce qu’il essaie de faire, c’est de peindre des images qui illustrent des événements et des échanges restés largement inaperçus » expliquent les deux auteurs, qui n’ont pas hésité à innover dans leur méthode d’investigation. Il leur a fallu démêler toutes les innovations maçonniques du XVIIIe siècle en suivant l’essaimage des ateliers à travers toute l’Europe. Comprendre la genèse des premiers hauts grades dits « écossais », à partir du premier d’entre eux, celui de Scots Master, tel aura été l’objectif des deux chercheurs. Ils y réussissent avec brio !

Essai
Marie Curie habite dans le Morbihan
De Xavier Jaravel
Éditions du Seuil
120 pages – 11,80 €

L’innovation accroît-elle les inégalités ? On serait tenté de le penser en voyant planer la menace de remplacement de métiers toutes catégories confondues par des robots, alors que d’autres touchent le jackpot en levant des fonds pour leur start-up. Sans parler du problème démocratique, certaines entreprises comme Google ou Facebook devenant aussi puissantes que des états. Le développement de l’intelligence artificielle, le déploiement de processus de production au moindre coût à l’échelle planétaire, l’apparition d’une quantité énorme de nouveaux produits de consommation ont bouleversé nos sociétés. Face à ces constats, le parti pris de Xavier Jaravel, qui a reçu le prix du livre d’économie en 2023 est de montrer qu’il est possible de concilier innovation et égalité en agissant sur certains leviers en particulier la politique éducative, l’un des piliers de l’innovation. Un ouvrage qui ne prétend pas avoir réponse à tout, mais qui propose des pistes de réflexion intéressantes. 

Essai
La conquête de la liberté
De Laurent Joffrin
Éditions Tallandier
479 pages – 22,90 €

32 portraits, de Mirabeau à François Mitterrand, composent ce livre, autour du thème de la liberté, « cette idée fondatrice de la nation française ». Des grandes figures sont mises en scène, qui ont franchi la rampe de l’Histoire : La Fayette, Lamartine, Hugo, Zola, Jaurès, de Gaulle… Quelques femmes, oubliées ou connues apparaissent au fil des chapitres : Louise Michel, Gisèle Halimi, Joséphine Baker… Bien oubliée, par exemple, Thérèsa Cabarrus, surnommée « Notre-Dame de Thermidor » : son portrait offre l’occasion pour l’auteur de revenir sur le Directoire, période troublée entre toutes. Chacun de ces portraits, d’ailleurs, autour d’un « héros », nous fait vivre un pan d’histoire de France, ce pays de révolutions (1789, 1793, 1830, 1848…) qui, pour l’auteur, n’avance vers la liberté que par des réformes. Certains de ces portraits sont « collectifs », regroupent deux personnages, qui se sont opposés ou pas. Comme celui consacré à Gertrude Stein et Joséphine Baker, égéries des années d’après-guerre, chacune dans leur domaine, symboles d’une évolution profonde de la société, même si la réaction n’était jamais loin. Ou celui de Camus et Sartre, qui confirme une fois de plus que le premier avait raison contre le second. Certes, tous deux avaient « en commun de s’appuyer sur le constat d’un monde sans Dieu et sans morale, qui oblige l’homme à choisir lui-même sa vie, à se forger seul une ligne de conduite, dans le vertige dangereux d’une liberté sans limites. »
Cet essai mérite une lecture attentive jusqu’aux dernières pages, qui abordent la période contemporaine, très proche, quand Joffrin revient sur 1989 (ce qu’on appelle « la chute du communisme ») et les années qui ont suivi. 1989, la liberté triomphe partout ou presque… 30 ans plus tard, « les démocraties doivent faire face à des systèmes totalitaires et des idéologies soudain ressuscitées, tyranniques ou théocratiques. » Et les régimes de liberté(s) sont attaqués de toutes parts. Denis Lefebvre

Bande dessinée
Joséphine Baker
De Catel & Bocquet
Éditions Casterman
576 pages – 12 euros

Joséphine Baker, figure marquante du XXe siècle et citoyenne du monde est entrée en 2021 au Panthéon, presque 50 ans après son décès.
Sa vie est bien connue aujourd’hui encore, depuis sa naissance en 1906 dans l’Amérique raciste jusqu’à son décès en 1975 à Paris. Ce roman graphique nous la raconte par le menu. Nous suivons sa carrière, ses triomphes dans les music-halls parisiens à partir de 1925 et dans le monde entier. Nous voyons aussi vivre une femme engagée dans la vie de la Cité, avec quelques temps forts : la Seconde Guerre mondiale, où elle se met au service de la France libre, ou sa participation en 1963 à Washington à la marche pour l’emploi et la liberté. Vêtue de son uniforme de l’Armée de l’Air, et portant ses médailles, elle prend la parole juste avant Martin Luther King, et lance aux jeunes : « Vous devez apprendre à vous protéger avec la plume, pas avec le pistolet ! » 
À côté du fond, la forme de ce volume doit être également évoquée, très originale, avec ces dessins en noir et blanc : en majorité, de très petites vignettes remplies de personnages (dont elle, bien sûr !) avec, comme des têtes de chapitre, de pleines pages mettant en scène les lieux où elle a vécu, aimé et travaillé et qui ont signifié quelque chose pour elle : un pont à Saint-Louis, un wagon entreposé dans une gare de Philadelphie, les Folies Bergère, le Casino de Paris, l’Opéra d’Alger, l’Imperial Hôtel de Tokyo, une villa à Roquebrune-Cap-Martin... Et comment oublier, c’est une évidence, le château des Milandes, dans le Périgord ! Ce château où elle a accueilli ce qu’elle appelait sa « tribu arc-en-ciel », ces enfants adoptés venus de tous les coins de la planète. Elle n’a pu empêcher la perte de ce château, trop longtemps cerné par les créanciers.
Une grande réussite, au service d’une grande dame, qui a toujours vécu en liberté. Denis Lefebvre

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