Le troisième président des États-Unis fut un grand amateur des vins liquoreux de Sauternes dont il visita les châteaux pendant son séjour à Bordeaux.
Thomas Jefferson, qui fut le troisième président des États-Unis après avoir rédigé la constitution américaine était-il franc-maçon ? Quelques doutes subsistent à ce sujet, mais la vérité penche plutôt pour sa non-appartenance à une loge. Homme au fort caractère pétri de l’esprit des Lumières et s’affichant ouvertement déiste, il proposa une version de la Bible expurgée de tout l’aspect surnaturel de la religion qui fut par la suite donnée en cadeau à tout sénateur nouvellement élu.
Jefferson était peut-être trop indépendant d’esprit pour s’affilier officiellement à la franc-maçonnerie dont il partageait cependant l’esprit. Du reste, dans son entourage proche comme dans sa famille, nombreux étaient les frères, à commencer par son petit-fils et ses neveux. On sait aussi que lors des quatre années qu’il passa à Paris, il fut convié à plusieurs réunions informelles de la loge des Neuf Sœurs. De retour aux États-Unis il participa à une procession maçonnique organisée par la Widow’s sons lodge N° 60 et la Charlottesville lodge N° 90 le 6 octobre 1817 et la Grande Loge de Virginie prononça un discours d’hommage pour ses funérailles le 4 juillet 1826.
Jefferson arriva en France pour succéder à Benjamin Franklin en tant qu’ambassadeur à Paris, poste qu’il occupa de 1785 à 1789. Il prit goût à la vie parisienne, fréquenta les salons littéraires et les librairies de la capitale. En mai 1787, de retour d’Italie, il fit un détour par le sud-ouest et s’arrêta à Bordeaux où il passera cinq jours. Arrivant de Toulouse, il fit halte dans le sauternais pour rendre visite aux propriétaires des châteaux d’Yquem et Coutet et passera commande de plusieurs centaines de bouteilles pour ses réceptions parisiennes. De retour en Amérique il demeurera fidèle au Sauternes.
Dans les années 1980 le goût de Jefferson pour le Château d’Yquem sera prétexte à un coup de pub portant sur la supercherie imaginée par un important fabricant allemand de lunettes qui prétendait avoir retrouvé des bouteilles du prestigieux vin de Sauternes dans les caves de la résidence de Jefferson et datant de son séjour à Paris…
Il est vrai que les grands Sauternes font rêver. Cette appellation située sur les côteaux de la rive gauche de la Garonne près de Langon produit des vins blancs liquoreux de qualité exceptionnelle grâce aux brumes automnales qui, alors qu’il fait encore doux, font prospérer sur les grains de raisin le botrytis cinerea, autrement appelé « pourriture noble ». Par l’effet d’un enzyme, celle-ci concentre à l’extrême le sucre des baies de muscadelle, sauvignon et sémillon, les trois cépages blancs emblématiques du Bordelais. S’ensuit une récolte grain par grain à la main, pour préserver la qualité exceptionnelle de vins inimitables pour leur douceur équilibrée et leurs arômes d’une rare complexité. Il faut noter que l’appellation Barsac, contiguë à Sauternes peut utiliser l’une ou l’autre de ces dénominations.
Ces vins rares et pour la plupart de grande valeur marchande s’apprécient pour eux-mêmes très frais, mais non glacés. On peut les servir avec du foie gras, mais ils permettent aussi de beaux accords avec les fromages persillés comme le Stilton et le roquefort, ou certains plats asiatiques relevés. Certains téméraires, amateurs de sensations rares, sinon fortes, les apprécient aussi sur les huîtres.