À juste titre, la philosophie des lumières passe pour une époque d’émancipation intellectuelle et bientôt politique. La pensée se révolte alors contre l’obscurantisme et l’intolérance. Elle dépouille le dogmatisme théologique de son arrogance, et dénonce les violences commises au nom d’une religion impérieuse, davantage soucieuse de domination terrestre que de transcendance céleste. Du rationalisme propre au grand siècle classique elle retient davantage la méthode que les constructions subtiles de métaphysiques grandioses, mais finalement arbitraires au regard d’un bon sens oublié. En France et en Grande-Bretagne, l’exigence rationaliste désormais disjointe de la spéculation métaphysique fait retour à l’expérience pour en explorer la réalité multiforme. L’exigence de lucidité invite à distinguer nettement le registre de la croyance et celui du savoir. Les phénomènes sensibles et les objets imaginaires ne doivent plus être confondus.
En France, Montesquieu et Rousseau imaginent une refondation de la politique, tandis que Voltaire, Diderot et Condorcet dénoncent l’intolérance religieuse et les divagations métaphysiques. Les encyclopédistes dressent le bilan du savoir humain et le rendent public afin de bousculer les préjugés. En Grande-Bretagne, dans le sillage de Locke, la critique de la métaphysique se radicalise. Empirisme et scepticisme mesuré se conjuguent au sein d’une philosophie soucieuse de préciser le sens des mots, de définir les concepts de façon claire et distincte. Et de réc