Pourquoi déclarer et même proclamer les droits de l’homme, sinon pour fonder une référence qui permette de juger la façon dont sont traités les hommes dans une société ? Par la même occasion, cette référence fournit aux victimes des injustices une charte de ce qu’elles sont en droit d’exiger, à rebours de toute fatalisation idéologique ou religieuse de la condition qui leur est faite. Dans l’histoire humaine, les déclarations des droits de l’homme constituent un renversement complet. On cesse d’invoquer la nature ou Dieu pour justifier les injustices, et on remet en question toute l’organisation sociale. L’existence attestée de mauvais traitements est alors dénoncée par la confrontation de ce qui est avec ce qui devrait être. Étant donné son rôle émancipateur et critique, l’évocation des droits de l’homme adviendra par la destruction des préjugés en cours dans la société à juger. Une telle démarche n’est pas aisée, et au dix-huitième siècle les philosophes des Lumières l’ont accomplie au péril de leur liberté. L’embastillement de Voltaire et de Diderot en témoigne. Une fois déclarés, les droits de l’homme font référence en tant que boussole pour identifier les injustices et promouvoir la résistance contre elles. Mais leur définition, supposée universelle à l’encontre de tout relativisme, peut-elle varier, et même doit-elle varier ? Histoire et philosophie seront nécessaires pour répondre.
Les injustices naissent toujours dans un contexte historique particulier. Mais les principes qui fondent leur mise en cause n’ont-ils pas une portée universelle dès lors qu’ils formulent des aspirations de simple humanité ? Liberté, égalité, intégrité physique et morale, dignité des conditions de vie, entre autres, sont prisées par tous les êtres humains, consciemment ou inconsciemment. Que devient la pérennité de ces principes d’émancipation quand les sociétés humaines évoluent ? On remarque en effet une variation des droits déclarés, et notamment