Les maladies nous l’annoncent. Nous mourrons un jour. Qu’en sera-t-il alors de nos espérances vibrantes, des joies qui naissent quand disparaît la souffrance, des plaisirs et des sourires mêlés ? Nous aurons goûté la vie et ses saveurs, la chaleur de l’amitié, l’élan de l’amour, les frissons du plaisir qui transfigurent l’expérience du monde. Nous aurons mené des luttes pour que le monde des hommes soit plus humain. Nous aurons joué un rôle, voire des rôles divers. Nous aurons souvent senti la fragilité, la finitude, le retour à une solitude radicale quand la mort se mêle à la vie et s’y rappelle comme sa destinée. Et chaque fois, sortant de scène, nous nous serons retrouvés dans le dénuement d’un rapport dégrisé. La conscience aura bu le présent, exalté l’avenir, chéri la mémoire. Logée en elle, la pensée aura tenté la mise à distance, et la mémoire des vécus successifs aura nourri les projections dans l’avenir, mais aussi les mélancolies. Qu’est-ce que l’homme ? La question surgit de la confrontation entre faiblesse et puissance, finitude et bonheur d’exister pleinement. L’Ecclésiaste : poussière tu étais, poussière tu redeviendras. L’infini et l’éternité mettent à l’épreuve le désir de vivre et la soif d’espérance. La seule force dont il dispose, l’homme la tient de lui-même, et déjà la mémoire des êtres disparus, des choses révolues, alourdit le temps de vivre. La mort n’est-elle que le dernier acte ? Pascal : « Le dernier acte est sanglant, quelque belle que soit la comédie en tout le reste : on jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais. » 1
La vie brève d’un « effrayant génie »
39 ans : la vie de Pascal est brève. Né le 19 juin 1623 à Clermont-Ferrand, Blaise Pascal meurt le 19 août 1662, à Paris. Génie des mathématiques et de la physique, accablé toute sa vie par des souffrances corporelles, Pascal voulut construire une apologie de la religion chrétienne. Il ne rejeta pas pour autant le rôle de la raison, mais entendit l’inscrire dans les limites d’une condition jugée déchue. Il insista sur le thème du péché originel qui fonde l’anthropologie chrétienne, et sur la finitude