Pierre Bayle naît le 18 novembre 1647 au Carla, près de Foix, dans une famille protestante. Il meurt en exil à Rotterdam, le 28 décembre 1706. Une vie courte, tourmentée par les différentes formes de l’intolérance religieuse. Mais une vie féconde, centrée sur la distinction entre foi et raison, pour conjurer les obscurantismes et les persécutions qui en résultent. De conversion en abjuration, de dissidence en révolte ouverte, se dessine l’avènement douloureux d’une pensée critique originale, dont l’œuvre fera date. Jusqu’à faire de l’éternel dissident une référence exemplaire pour les tenants d’une autre spiritualité que celle de la religion chrétienne. Les francs-maçons, les libres penseurs, et les rationalistes de toutes orientations cultivent la mémoire de Pierre Bayle comme celle d’un penseur majeur de la tolérance, précurseur des Lumières. Voltaire, entre autres, avoue sa dette intellectuelle à son égard et lui rend un hommage appuyé. L’audace et la rigueur, le rejet de tout dogmatisme et la dénonciation de l’intolérance, définissent l’esprit de son œuvre.
Croyant sans dogmes, Bayle considère que le mélange de la foi et de la raison est contre nature, car il pervertit l’une et l’autre par la confusion de domaines très différents. Son Dictionnaire historique et critique, exemplaire par la culture multiforme qui l’habite et l’audace rationaliste qui en est le ressort, préfigure par son ampleur, et par son courage, l’Encyclopédie de Diderot. À ceci près que Bayle fut seul à en rédiger les articles. Quelques mots pour situer sa pensée dans le contexte de l’affrontement entre catholiques et protestants, puis