Essai
e Pierre Lascoumes
Éditions du Seuil – La République des idées
100 pages – 11,5 €
Notre démocratie serait-elle minée de l’intérieur par une corruption lancinante ? Conflits d’intérêts, scandales politico-financiers, succession de petits arrangements entre amis écornent notre modèle démocratique, alimentant une défiance politique de plus en plus accrue. Pierre Lascoumes montre pourtant toute l’ambiguïté d’un phénomène.
Car si tout le monde semble d’accord pour affirmer que l’exercice perverti du pouvoir est contraire aux fondements de la démocratie, tout se passe comme ci aux yeux de bon nombre de citoyens, rendre visible ces transgressions ferait courir un risque de déstabilisation de tout notre système politique. Qui plus est, ce qui fait corruption pour les uns, ne le fait pas pour les autres. En matière de corruption, c’est donc la tolérance qui règne. Pierre Lascoumes analyse dans cet ouvrage les liens complexes unissant les citoyens à leurs élus, leurs conceptions du politique, ainsi que les justifications et excuses dont bénéficie la corruption et qui expliquent l’inertie des comportements.
Essai
Solitudes du pouvoir
De Jean-Michel Djian
Editions Grasset
162 pages – 15 €
Jean-Michel Djian est journaliste et producteur à France-Culture. Précédemment, il a écrit de nombreux ouvrages consacrés aux hommes politiques. Le prologue évoque Daladier, rentrant de Munich en 1938 ; il vient d’essayer de négocier la paix avec Hitler et Mussolini. À sa descente d’avion, on l’entendit murmurer : « 'les cons ! »'. Il venait de découvrir la joie des Français qui croyaient que la paix était sauvée. Jean-Michel Djian ajoute : « Elle est là la solitude du pouvoir, dans l’ivresse des symboles, l’incandescence du mensonge. Dans la jouissance d’un réel qui n’existe pas. » Jean-Michel Djian a cherché à comprendre les sentiments que connaissent les hommes d’État face à l’Histoire. De Gaulle apparaît donc comme « 'la solitude incarnée »' ; Pompidou, c’est « 'la solitude contrariée »' par la maladie ; Giscard, c’est la solitude « 'd’un homme paradoxal à la fois éclairé et éteint »' ; Mitterrand, c’est un pouvoir contrarié par la cohabitation ; Rocard connut une autre forme de solitude ; la fonction de Premier ministre fut pour lui une pénitence en raison de son inimitié avec le Président Mitterrand ; Juppé, c’est une « 'solitude obligée »' ; la solitude de Chirac était « 'désenchantée »', peut-être parce qu’il a eu « 'l’illusion de gouverner la France avec un surmoi en forme d’homme d’Etat »' ; Sarkozy est un solitaire « 'à qui l’agitation procure les mêmes bienfaits que le recueillement pour un ermite »' ; Hollande, c’est une « 'solitude désespérée »' ; cela provient peut-être de ce qu’il est « 'vierge de pouvoir »'. En étudiant la solitude chez plusieurs hommes d’État, quelle que soit leur tendance, Jean-Michel Djian fait preuve d’une objectivité certaine. Son livre mérite donc d’être lu.
Roger Klotz
Biographie
Jean Macé
Militant de l’éducation populaire
De Jean-Michel Ducomte
Editions Privat
285 pages – 19 €
Tout semble résumer dans ce titre, la personnalité de Jean Macé, figure de son temps, insatiable militant en faveur de l’instruction obligatoire. Issu d’un milieu modeste, ce qu’il aimera à souligner non sans fierté en affirmant « je suis un fils de camionneur. Je suis un camionneur d’idées », Jean Macé portera le projet de la ligue de l’enseignement, qu’il crée en 1866 pour dit-il « fabriquer des citoyens ». Jean-Michel Ducomte, spécialiste de droit public et de sciences politiques retrace la trajectoire hors du commun d’un homme qui incarnera les valeurs chères à la République et vivra les contradictions d’une époque de grande instabilité politique, marquée par l’émergence d’une classe ouvrière en marge du progrès social. Forcé de quitter la capitale en 1852, avec le rétablissement de l’Empire, Jean Macé, alors journaliste, épris de littérature deviendra « professeur de demoiselles » dans un pensionnat alsacien tenu par Coraly-Léopoldine Vérenet. C’est là que naitra sa vocation et son engagement. Une biographie richement documentée sur un homme dont la personnalité et l’œuvre restent trop largement méconnues.