Véritable mémoire de la loge pour avoir, depuis 1947, rencontré tous les membres de l’atelier Union et Travail, elle connait tous les Frères et tous appellent Madame Lefebvre… « Camille »… Les générations de maçons qui se sont succédé lui doivent beaucoup. Le 9 avril ils rendent hommage à celle qui reste encore aujourd’hui la gardienne du Temple. Un rôle que « Camille » n’abandonnerait pour rien au monde.
Née Baroën au Havre le 1er avril 1916, mais déclarée le 2 pendant le premier conflit mondial, Camille n’a pas eu une jeunesse facile, elle n’a pas connu son père et sa mère vendait du poisson sur le port. Quand sa mère se remarie, Camille va aller chez sa marraine en France, à Lens. Milieu modeste, où elle va se sentir heureuse. Elle travaille chez une modiste. Très adroite de ses mains, elle en ressent une certaine fierté, elle a beaucoup de caractère, et sait se mettre en valeur.
Camille rencontre en 1936 Alphonse lors d’un bal à Lens ; leur mariage est célébré le 14 août 1937. Né à Lens, le 18 février 1912 ; il est le fils d’un chef mécanicien des Mines de Lens ; en 1934, il intègre les chemins de fer. Ils ont d’abord deux garçons, Alain en 1944, puis Bernard en 1946. La famille habite une maison plutôt spacieuse que Camille adore.
Alphonse est initié en 1945 à Union et Travail (n° 47). Sollicité par un Frère de la Fidélité Louis-Léopold Boily, il aurait pu être initié dès 1939 ; les aléas de la mobilisation qui suivit différèrent son entrée en franc-maçonnerie. En 1947, sur proposition du vénérable maître Henri Lemaire, Alphonse, accepte de déménager dans l’appartement du « très fameux » 14 rue Uriane Sorriaux. Le rez-de-chaussée accueillait la Fédération socialiste du Pas-de-Calais. Ils déménagent le 23 janvier 1947. Pour Camille, c’est bien petit, une seule chambre, pas de salle de bain ; mais les hommes sont à l’époque souvent seuls décisionnaires. Rapidement une fille, Dany, vient agrandir la famille en 1949. Camille avec trois enfants et la responsabilité de tout le rez-de-chaussée se consacre pleinement à ce nouveau nid familial. Dès l’arrivée du ménage Lefebvre, Union et Travail bénéficie d’un gardiennage permanent. Entre temps, Alphonse est élu conseiller municipal sur la liste du docteur Schaffner qui devient maire de Lens. Sur le plan maçonnique, Alphonse fut très longtemps l’inamovible frère hospitalier. Bénévole il fut trésorier du Goujon Lensois. Sportif dans l’âme, il assuma la présidence du Tennis Lensois, et du Rugby Olympique Lensois. Pour Camille au départ, il n’y avait qu’un seul atelier, une sorte de famille en somme. Elle écoute, conseille, reçoit et console tous les postulants avant et après la cérémonie du bandeau. Son légendaire sourire a pour effet de neutraliser toutes les appréhensions avant les épreuves initiatiques. C’est elle qui ajuste les costumes et les cravates des Frères avant les tenues, c’est elle qui tient le bar, entretient les locaux, veille à ce que tout soit bien rangé à la bonne place, et, en gardienne du temple vérifie avant de monter se coucher que les lumières soient bien éteintes.
La loge Union-Travail de la Grande Loge de France a reçu en 1904, du Suprême Conseil de France sa patente constitutive. Elle accueille aujourd’hui dans ses locaux 10 loges que Camille reçoit donc à chacune de leurs tenues, 20 par mois. Union-Travail de Lens héberge des loges de plusieurs communes et de plusieurs obédiences et notamment de la GLDF dont les loges La parfaite union d’Hénin-Beaumont, Les frères écossais de la Gohelle, et L’égrégore artésien de Lens. Mais depuis 69 ans, Camille ne fait pas les choses à moitié tout doit être parfait.
Alphonse décède en 1999. Camille continue à s’occuper de la salle humide, du Temple, baptisé depuis « Temple Alphonse Lefebvre », avec la même vigilance et une certaine volonté et fermeté, face aux multiples vénérables maîtres qui passent et qu’elle initie au bon fonctionnement des locaux.
Telle la mère d’une Cayenne qui porte un regard tendre sur les excès de zèle de ses Compagnons parfois turbulents, Camille a su traverser le temps, fière de ses frères en humanité qu’elle regarde et protège de ses yeux malicieux.
Rendez-vous dès 10 h 30 le 9 avril salle Jean Nohain à Lens dans le Pas-de-Calais
Un hommage sera rendu à Camille Lefebvre en présence notamment des passés grands maîtres de la Grande Loge de France Alain-Noël Dubart et Louis-Max Vitton et du maire de Lens Sylvain Robert. La cérémonie sera suivie d’un repas. Renseignements et réservations :