Trois citations permettent de cadrer le débat, autour de la loi de 1905. La première est certes quelque peu antérieure, mais elle est en plein dans la question. Elle est due à l’homme du convent de 1877, le pasteur protestant Frédéric Desmons, un temps grand maître du Grand Orient de France, qui a déclaré en 1901, dans une conférence organisée par la Libre Pensée : « Notre France à nous, Français, elle n’a pas à recevoir d’ordre d’un étranger, fut-il habillé de blanc et coiffé d’une tiare ». La seconde, nous la trouvons sous la plume de Jean Jaurès, dans La Dépêche du Midi du 30 avril 1905 : « La grande réforme de la Séparation, la plus grande qui ait été tentée dans notre pays depuis la Révolution française. » Enfin, la troisième émane du pape Pie X, qui a affirmé en janvier 1907, après la promulgation de la loi : « On a déclaré la guerre à tout ce qui est surnaturel. » Attardons-nous un peu sur ces deux dernières citations : elles illustrent parfaitement le débat. L’un, Jean Jaurès, socialiste et républicain, l’inscrit dans les grandes réformes marquant l’histoire de la France. L’autre, le pape, la cantonne dans le domaine religieux. Deux conceptions du monde et de la société s’affrontent. Pourtant, quoi qu’en dise le pape, la Troisième République avec la Séparation ne s’en prend pas à la foi, au surnaturel, mais plus simplement au cléricalisme, jugé insupportable par le plus grand nombre.
Dans les dernières années du XIXe siècle, la France est encore une terre concordataire, c’est-à-dire régie par le Concordat de 1801 (voir encadré). Mais la situation politique et affective change à la fin du XIXe siècle. Les mentalités ne sont plus les mêmes. Les républicains et les laïcs veulent soulever la chape de plomb que fait peser l’Église sur la France, non pas par anti-religion, mais par anticléricalisme. Ils ne supportent plus cette volonté de l’Église catholique de se préoccuper de la vie de la Cité, de la société, des mœurs. Tous ces a