Culture

Nicolas de Staël au Maroc

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Automne 1917. Moscou est assiégée. L’Empire russe chancèle avant de s’effondrer. Nicolas de Staël a seulement quatre ans quand l’Histoire le jette sur les chemins du monde. Ce sera d’abord la Pologne où sa mère et son père, vice-commandant de la forteresse Pierre-et-Paul de Saint-Pétersbourg, trouvent la mort, puis la Belgique où, l’orphelin est confié à sa marraine. 

C’est donc dans le Bruxelles du début des années 30 que le jeune Nicolas de Staël muscle son regard en s’imprégnant des œuvres de Rubens. Il se forme dans plusieurs institutions, dont l’Académie royale des Beaux-Arts où il restera trois ans. Dès lors, il multiplie les voyages dans la France voisine. À Paris qui est encore pour quelques années la capitale mondiale de l’art, le jeune homme se familiarise avec l’abstraction. Dans le Midi, en pèlerin, il suit les traces des prophètes de l’Art moderne parmi lesquels Vincent Van Gogh, Paul Cézanne et Henri Matisse. La boussole du peintre indique le sud. De Staël part à la découverte du patrimoine arabo-musulman de l’Andalousie. Ce répertoire iconographique, cette atmosphère orientale peupleront longtemps sa mémoire. Au début du mois de juin 1936, le peintre entreprend un voyage au Maroc. Littéralement saisi par la beauté chromatique des paysages et par la vie qui bourgeonne tout autour de lui, il y restera près d’un an et demi. En emportant avec lui le récit du voyage qu’Eugène Delacroix avait fait un siècle plus tôt, il met ses pas dans ceux de l’orientaliste français. Là-bas, sous l’incandescence azurée d’un ciel sans nuage, les motifs disparaissent pour ne laisser que des formes de couleurs pures. Point d’écume, mais du blanc, point de fruits sur les étals des marchés, mais du rouge et du vert, point de burnous portés par les Berbères à Essaouira, mais du jaune, de l’orange. Dans ce jeu complexe visant à simplifier le réel, la mer elle-même s’évapore pour ne laisser que d’infinies nuances de bleu. Les lettres que Nicolas de Staël écrit à cette époque traduisent fidèlement sa fascination pour une culture ancestrale préservée d’une modernité qui défigure. 
Dans le sud du pays, en 1937, il fait la connaissance d’un peintre polonais Olek Teslar et de sa femme Jeannine Guillou, artiste également. Hippies avant l’heure ce couple erre dans le sud du Maroc et l’Algérie voisine. Le regard brûlant de Jeannine Guillou envoûte le jeune russe. Une passion naît. Une histoire commence. Nicolas et Jeannine sillonnent désormais ensemble le Maroc avant de rentrer en France faute d’argent. 

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