Vercingétorix était-il franc-maçon ? Non, bien sûr. Mais comme on le dit de ceux que l’on appelle « maçons sans tablier », il aurait pu l’être…
Le 11 octobre 1903, à Clermont-Ferrand, fut inaugurée place de Jaude, la statue de Vercingétorix, en présence de deux illustres frères : le président du Conseil, Émile Combes, et son ministre de la Guerre, le général André. La réalisation de ce monument était due à un autre maçon, le sculpteur Bartholdi.
Ce jour-là, ce n’était pas seulement le chef gaulois, incarnation de l’esprit auvergnat qui était célébré. Il s’agissait aussi à travers l’emblématique figure du vainqueur de Gergovie, de glorifier tout à la fois la République, la Nation et le porte-étendard de la « race française » comme le proclama l’article « Vercingétorix et la race française » qu’avait publié en 1886 le Bulletin historique et scientifique de l’Auvergne.
La vérité est que Vercingétorix fut, si l’on peut dire, mangé à toutes les sauces. Dès le XVIIe siècle, un des premiers historiens français, Henri de Boulainvilliers avance l’idée d’une guerre des « deux races » selon laquelle la souche du peuple français serait d’ascendance gauloise et la noblesse d’ascendance franque. L’idée sera reprise sous la révolution puis au XIXe siècle par l’historien libéral Augustin Thierry et fut même partiellement réinterprétée par Karl Marx dans sa conception de la lutte des classes. À la même époque, l’Église qui s’approprie Jeanne d’Arc comme sainte de la patrie ne voit pas d’inconvénient à lui associer Vercingétorix ainsi que le montre une statue réunissant les deux figures exposées au musée d’art Roger Quillot de Clermont-Ferrand.
Alors que se consolide l’unité nationale autour de l’idée républicaine, la figure de Vercingétorix qui pourtant tient plus du roi guerrier que du paysan laborieux, est abondamment utilisée par l’école publique pour faire de chaque petit français un descendant du chef gaulois, figure au demeurant ambiguë dont le caractère associe la fierté dans la victoire à la dignité dans le malheur. Rien d’étonnant donc à ce que le régime de Vichy ait célébré l’illustre gaulois lors d’une cérémonie grandiose organisée sur le plateau de Gergovie en 1942.
Si la franc-maçonnerie est présente à Clermont-Ferrand depuis 1774, c’est la loge Les enfants de Gergovie créée en 1868 qui porte haut les couleurs du Grand Orient de France depuis plus d’un siècle et demi. Ses colonnes s’honorent d’avoir vu siéger nombre d’avocats et autres figures de la vie politique et intellectuelle clermontoise dont le journaliste socialiste Alexandre Varenne (1870-1947) fondateur du quotidien régional La Montagne.
Le terroir volcanique de la région ne se contente pas de donner un peu de son caractère à ses enfants. Il le transmet aussi à ses vins, connus sous l’appellation « Cotes d’Auvergne » produits sur une cinquantaine de communes autour de Clermont-Ferrand. Issus pour les rouges et les rosés du pinot noir et du gamay, et pour les blancs du chardonnay, ils se déclinent en cinq crus villageois : Corent, Châteaugay, Boudes, Madargue et Chanturgue, dont le nom dériverait, dit-on du latin campus orgius, le champ des orgies où l’on célébrait des bacchanales. À consommer tout de même avec modération. Les côtes d’Auvergne, surtout appréciées localement sont des vins d’un bon rapport qualité — prix qui accompagnent idéalement les fromages et charcuteries du terroir auvergnat.