Nous en parlions dans une précédente chronique, l’apparition du testament en franc-maçonnerie n’intervient qu’au début du XIXe siècle. Il faudra attendre la fin du XIXe siècle pour que lui succède le testament philosophique.
Nulle trace en effet de testament dans la franc-maçonnerie des origines. Le candidat était reçu une première fois en loge où une discussion avait lieu. Puis, si l’avis était favorable, il était initié.
La rédaction d’un testament par le profane, apparue, très probablement au début du XIXe siècle sous l’impulsion du Rite Écossais Ancien et Accepté avait comme vocation première de provoquer l’effroi chez le candidat. On le constate par la représentation d’une tête de mort que les documents officiels arboraient. Le but caché étant, très probablement, de se prémunir contre les simples curieux et les aventuriers avides de sensations qui disparaissaient ensuite, mais aussi de solenniser la réception en mettant le profane sur ses gardes lui ôtant tout état de légèreté. Sans compter également le fait de rendre réelle la conséquence d’un manquement au serment.
Toutefois, la sévérité d’une telle demande de rédiger son testament pour entrer en franc-maçonnerie dut causer quelques tracas en loge. On assiste ainsi à la fin du XIXe siècle, dans les textes, à un glissement de sens. Ainsi, dans le rituel fondateur du Droit Humain de Georges Martin daté de 1895, outre la modification du nombre de questions (5 au lieu de 3) pour s’adapter aux voyages, il est précisé à la section concernant le testament : « Quels exemples désirez-vous léguer à vos Parents et à vos semblables ? » Le testament devient alors un leg d’exemplarité.
Un premier indice de cette évolution était déjà repérable en 1893 avec le testament de l’initiation de Maria Deraismes. Voici ainsi la note de bas de page inscrite pour expliquer ce qu’il fallait entendre par le mot testament : « Il ne s’agit point ici pour la profane de prendre des dispositions pécuniaires et d’ordre successif, mais de faire connaître par un testament moral et philosophique le but qu’elle entend donner à sa vie, et de dire quels exemples elle espère léguer aux siens ».
Ce à quoi Maria Deraismes avait répondu : « Mes travaux, mes écrits, mes discours disent assez quel a été le but de ma vie. Certes je n’ai pas la prétention de léguer un grand exemple après moi. Mais j’affirme que je laisserai celui de la plus profonde conviction dans la progressibilité indéfinie de l’humanité et du plus sincère amour de mes semblables. »