Que venez-vous chercher en loge ? demande le catéchisme maçonnique. « Vaincre mes passions et soumettre ma volonté à mes devoirs » est la réponse. Elle montre bien qu’il ne s’agit pas seulement d’étudier un nouveau langage symbolique ou de changer la société : un certain « perfectionnement » de la personne fait partie du programme. « Deviens ce que tu es » suppose que nous ne sommes pas encore ce que nous sommes, et que nous pouvons le devenir. Cette quête intérieure suppose aussi que l’on puisse tirer certaines « leçons » de sa vie antérieure. Car si l’initiation est une seconde naissance, elle est souvent aussi une seconde chance dans une vie limitée. Le philosophe américain Stanley Cavell (1926-2018) propose de considérer les comédies de Hollywood comme la mise en scène de ce perfectionnement intérieur, et la représentation de la vraie philosophie américaine.
Quelle est la vraie philosophie de l’Amérique ? Pays de colonisation, l’Amérique a été d’abord envahie par l’utilitarisme anglais, devenu le pragmatisme de William James (1842-1910) et de John Dewey (1859-1952). Avec la montée du totalitarisme en Europe, Allemands et Autrichiens (juifs, mais pas seulement) sont venus occuper, et recréer d’ailleurs les universités américaines (sur le modèle allemand, coupé de la société) : le positivisme logique de Rudolf Carnap (1891-1970) et de Willard Van Orman Quine (1908-2000) va dominer tout le terrain académique