Solidement calé dans son canapé, son chat assoupi à ses pieds, Jean Acacio décida de commencer son weekend par un livre dédié à la fraternité, Ce que la France doit au Francs maçons, des compères Pierrat et Kupfermann. En ces temps de crise autant éthique que sociale, il est bon de revenir aux fondamentaux, songea Jean, et il se plongea aussitôt dans le chapitre consacré au service militaire dont curieusement personne n’aime à rappeler combien il doit aux frères. Comme il lisait avec attention, le portable sonna. Le mot « Vénérable » fit son apparition sur l’écran. Pour plus de facilité, Jean avait rentré tous les officiers de la loge, dans son répertoire, sous leur titre et fonction. De quoi causer parfois quelque quiproquo comme le jour où une petite amie de passage lui avait très sérieusement demandé s’il travaillait pour l’administration pénitentiaire : « Frère premier surveillant » s’était affiché, agrémenté d’une sonnerie particulièrement martiale. Jean soupira. Son Vénérable l’appelait toujours le samedi matin, les lendemains de tenue quand crâne et estomac se rappelaient, non sans malédiction réciproque, les regrettables excès des agapes. Il décrocha.